Des livres magnifiques sur les hommes et la mer
Bernard Moitessier : La longue route
C’est un voyage à la voile en solitaire qui totalise 35 455 milles en 10 mois sans escale, du 22 août 1968 à Plymouth au 21 juin 1969 à Tahiti. Moitessier se fond totalement dans son environnement et sait décrire ses sentiments. Il est profondément humaniste et très avant-gardiste dans la réflexion écologiste !
« Le Horn a été arrondi le 5 février (1969) et nous sommes le 28 mars. Je continue sans escale vers les îles du Pacifique parce que je suis heureux en mer, et peut être aussi pour sauver mon âme. »
Louis Cozan : Un feu sur la mer, mémoires d’un gardien de phare
Paru en 2011, ce livre passionnant a été écrit par un gardien de phare. Louis Cozan a été gardien dans plusieurs phares, et en particulier dans celui de Kéréon.
« Les jours se suivent et se ressemblent ; le vent, qui balaye l’Iroise sans discontinuer depuis des semaines, a pétri des vagues si hautes et si noires, que en ce début de février, la mer ne ressemble plus à rien de connu… Notre univers est sens dessus dessous. Ce matin on s’est dit, en riant, que notre monde était « chanversé » ! Depuis le sommet du phare nous apercevons dans les creux de houle des rochers que personne avant nous n’avait vus. C’est du moins, ce que nous nous disons. Jour et nuit, l’océan habite nos têtes, nous dormons en tranches courtes, entre deux chocs qui ébranlent notre habitat vertical. »
Gustave Toudouze : Le bateau des sorcières
La vie des pêcheurs Camaretois dans la zone de navigation formée par l’île de Sein, la Pointe du Raz, la presqu’île de Crozon et la Pointe Saint-Mathieu, sur fond de légendes et croyances, et de vies décimées par la mer ou le choléra…
« Dans ses artères, le sang de sa race aventureuse, imprudente et hardie, après avoir été engourdi quelques temps, comme endormi, roulait de nouveau, de plus en plus vif, de plus en plus ardent, le lançant à la recherche des choses inconnues, mystérieuses, sans lesquelles son cœur et son âme ne sauraient connaître de joie complète, d’assouvissement véritable. »
Henri Quéffelec : Un feu s’allume sur la mer
Un roman sur l’histoire de la construction du phare sur Ar Men, menée par les ingénieurs des Ponts et Chaussées et les marins sénans dans les années 1860.
« Et voici, une période qui plongeait dans la nuit des âges avait pris fin. La roche n’était plus tout à fait elle même, qui avait accepté dans sa pierre le métal des hommes et portait contre sa surface un gros anneau brillant. Les congres familiers et les crabes qui monteraient au-dessus d’elle avec le retour du flot connaîtraient qu’ils devraient habituer leurs sens à ce prodige et ils en porteraient la nouvelle dans la profondeur. C’était toute la Chaussée de Sein qui portait un anneau ! »
Jean-Pierre Abraham : Armen
En 1967, il fait paraitre un récit de sa vie de gardien à Armen.
« Brume. Depuis deux jours. Nous ne parlons plus. Nous ne prenons plus nos repas ensemble(…). On ne peut rester dans la chambre de veille, à cause du froid, et du bruit. Aucun refuge. Quarante-cinq secondes, entre les coups de sirène, pour aller surveiller le feu, inutile. Lorsqu’on ne peut redescendre assez vite, on se ramasse en boule, là-haut, près de l’optique, on se bouche les oreilles de toutes ses forces. Quand le hurlement éclate, un violent sursaut traverse malgré tout le corps.(…) Reflets de perle. L’aube. On ne voit pas le pied du phare. Le bruit de la sirène résonne sur l’eau comme dans une cathédrale. »
Anatole Le Braz : Le gardien du feu
Relatant un drame passionnel, ce roman édité en 1900, est inspiré d’un fait divers ayant eu lieu dans le secteur de la Pointe du Raz. Le personnage central est le gardien du phare « La Gorlébella », appelé par la suite « La Vieille ».
« Le grain!… Dix heures au chronomètre. La mer flagellée bondit et se cabre. Tout le Raz est blanc, d’une blancheur livide, comme un mouvant paysage de neige sous la lune. Une crinière d’eau a cinglé la vitre : la lanterne en a frémi jusque dans ses nervures d’acier… »
Odette du Puigaudeau : Grandeur des îles
En 1929 elle embarque à Concarneau sur un thonier grésillon, le « Quatre-frères », munie d’un livret de navigation obtenu grâce à des femmes de Séné. Elle passe par les îles bretonnes, Ouessant, Molène, Sein…
A Ouessant : « Depuis quatre jours la brume est là, oppressante, écœurante, avec son goût de fumée, de goémon pourri, et de désespoir. »
Anita Conti : Racleurs d’océans
Alors qu’elle a embarqué sur un morutier qui entreprend la traversée de l’Atlantique vers les bancs de Terre-Neuve (en 1952) :
« …, Jean-Yves Cousteau, et tous les garçons et les filles qui les suivent… Je pense à eux en voyant fuir la mer au long de nos flancs ; elle est épaisse et gémit d’être au long des heures déchirée par l’étrave ; ses ondulations se prolongent et renaissent ; elles vont se perdre dans la nuit. Leur surface est bien une frontière entre deux mondes. Le seul regard humain ne la perce pas. »
Pierre Loti : Pêcheur d’Islande
Les marins paimpolais s’embarquaient pour de longues campagnes de pêche. Ce livre raconte la vie à bord lors de ces longues semaines en mer dans les années 1885, mais aussi les longues attentes à terre. C’est l’histoire passionnée de Yann et Gaud.
« Depuis deux jours, ces brumes tristes de l’aube avaient commencé, et ce matin-là Gaud s’était réveillée avec une inquiétude plus poignante, à cause de cette impression d’hiver… qu’avait donc cette journée, cette heure, cette minute, de plus que les précédentes ? … on voit très bien des bateaux retardés de quinze jours, même d’un mois. »